Dans la douceur de l’hiver, la Provence a revêtu son habit de Noël. Marchés au santon, pastorales, crèches animées et Gros souper animent notre escapade.
Pas de neige dans la campagne provençale mais le ciel a bien été dégagé par le mistral et des étoiles scintillent dans le bleu de la nuit. A quelques heures de Noël, dans les villages provençaux, la magie a opéré. Il faut dire qu’ici, les traditions calendales sont encore très vivantes et, de la Sainte-Barbe à la Chandeleur, pas une semaine ne passe sans que l’on prépare Noël.

©OT Aix-en-Provence
De marchés en foires
Durant le temps de l’Avent et jusqu’au 24 décembre, les marchés de Noël animent la Provence. D’Aix-en-Provence à Marseille en passant par Martigues et Saint-Rémy-de-Provence, il flotte comme un air de fête qui met des étoiles dans les yeux des petits et des grands. On replonge en enfance en humant les doux parfums de fleur d’oranger qui s’échappent de la pompe à l’huile, au marché des 13 desserts. On déambule parmi les étals à la recherche des meilleurs produits pour préparer le souper de Noël. On y fait le plein de cadeaux artisanaux : un savon de Marseille, une poterie, une cigale en céramique ou en cire, une bougie, des douceurs provençales... L’occasion de faire découvrir à ses proches des produits locaux de qualité. On y découvre aussi le savoir-faire ancestral des maîtres santonniers présents dans les Foires aux santons. Celles de Marseille et d’Aix-en-Provence rassemblent, dit-on, les meilleurs qui, pour l’occasion, ouvrent aussi les portes de leur atelier. De quoi rapporter quelques personnages d’argile dans ses bagages. D’ailleurs, la coutume veut que l’on en ajoute un nouveau chaque année dans sa crèche. Pour trouver l’inspiration, on ne manque pas de visiter une crèche dans un des villages provençaux. Celle, animée, d’Allauch près de Marseille est incontournable avec ses 600 santons qui nous invitent au voyage au cœur de la Provence d’autrefois.

©Muriel Pellegrin ADT Vaucluse Provence
Des visites gourmandes
Aix-en-Provence est sans doute la ville la plus douce de la région. Impossible en effet de ne pas succomber à la spécialité locale, le calisson, fabriqué avec du sucre, des amandes douces et de la pâte de melon confit depuis le XVe siècle. A la Fabrique de la Confiserie du Roy René, on peut venir librement suivre le travail des confiseurs et les étapes de production. Abrité à l’étage, le Musée du Calisson nous invite à traverser le temps et les saisons. En présence d’un maitre-confiseur, l’atelier au sein de la boutique du centre ville permet de réaliser soi-même les ‘‘câlins’’ provençaux de manière artisanale, sur les machines historiques de la Confiserie.
Autre temple de la gourmandise à deux pas de la ville : la Chocolaterie Puyricard. Visite du laboratoire, atelier et stage créatif, on s’offre une plongée en famille dans ce monde fascinant et on repart avec une boîte de ces délicieux chocolats artisanaux.
La fin d’année en Provence correspond aussi à la saison de récolte de l’olive et à l’élaboration de l’huile d’olive dont l’AOC Huile d’Olive d’Aix-en-Provence. Durant tout le mois de décembre et de janvier, les moulins ouvrent leurs portes aux visiteurs et fêtent l’huile d’olive nouvelle. Voilà de quoi offrir des paniers bien gourmands.

©Musée du Calisson, Confiserie du Roy René

©Confiserie du Roy René
Un réveillon typiquement provençal
Après avoir fait ses dernières emplettes, il est temps de rentrer car on a du pain sur la planche, pour préparer le « gros souper », ce repas maigre, c’est-à-dire sans viande comme le veut la tradition la veille de Noël, mais néanmoins copieux. On dresse la table selon le rite calendal, avec 3 nappes blanches, éclairée de 3 bougies et décorée de 3 coupelles de blé de l’espérance semé à la Sainte-Barbe.
Après le « cacho-fio », l’allumage rituel de la bûche de Noël par le plus jeune et l’aîné de la famille, c’est le moment tant attendu de passer à table. Sept plats vont être servis, qui symbolisent les souffrances de Marie : aigo boulido (soupe à l’ail), escargots, omelette à la truffe (la pleine saison), brandade de morue, aïoli, cardes en sauce blanche… Des plats qui varient selon les villages et les familles, en fonction de ce qu’offre le terroir. Le poisson frais, notamment l’anguille, le thon, la daurade, fait honneur au souper sur la côte méditerranéenne. Les légumes occupent une place de choix dans la Provence intérieure : gratin d’épinards en persillade à Apt, céleris crus à l’anchoïade, poireaux blanchis, courge, chou-fleur, artichauts... Dans la montagne provençale, on sert traditionnellement des crouzets, des pâtes en lanières.

Les 13 desserts
Invariablement 13 comme le nombre de convives de la Cène (le Christ et ses 12 apôtres), les desserts de Noël diffèrent légèrement d’un coin à l’autre de la Provence, mais ont toujours en commun la fougasse à l’huile d’olive que l’on appelle pour la circonstance « pompe à huile », les 4 mendiants en rappel aux ordres religieux (les figues sèches pour les Franciscains, les amandes pour les Carmélites, les raisins secs pour les Dominicains et les noix pour les Augustins), les dattes, symbole du Christ venu d’Orient, et les nougats, blanc pour la pureté et le bien, noir qui évoque l’impur et le mal.
A Aix, on y ajoute les calissons, à Marseille, les navettes, à Pézenas, les oreillettes, à Apt et à Saint-Rémy de Provence, les fruits confits, ailleurs la pâte de coing, les croquants aux amandes... Conservés depuis leur récolte en septembre dans les caves et greniers, les fruits frais complètent ce buffet de douceurs : oranges, mandarines, poires, pommes, raisins ou melon d’eau.
Selon la tradition, on sert ces 13 desserts en même temps et en abondance sur la table, pour qu’ils y restent trois jours. On les déguste avec du vin cuit pour s’assurer bonne fortune pour toute l’année. Un vin qui est confectionné par quelques familles vigneronnes dans le pays d’Aix, à partir du moût conservé lors des vendanges, cuit au feu de bois de chêne dans un chaudron de cuivre et vieilli en fût de chêne quelques années. Alors que les cloches de l’église du Saint-Esprit commencent à carillonner, à Aix et dans les campagnes environnantes, on avale encore un petit verre de fenouillette, une liqueur à la graine de fenouil. En retard, on se presse alors, lanternes à la main, pour rejoindre amis et voisins et célébrer la messe de minuit dans la tradition provençale. Bòn Nouvé * !
*Joyeux Noël en provençal