lundi 24 juin 2013

A la découverte des huîtres de Normandie

En ce jour du 69ème anniversaire du débarquement en Normandie (le 6 juin, donc), cap sur la côte ouest du Cotentin et, plus précisemment à Blainville-sur-Mer. J'ai rendez-vous avec Louis Tessier, ostréiculteur, et Christophe Charbonnier mytiliculteur, pour me parler de la conchylicyulture en Basse-Normandie et me faire découvrir un parc à huîtres.

2013 06 06 - dunes de Blainville (7)

2013 06 06 - plage de Blainville (5)

2013 06 06 - plage de Blainville (4)

Mais, avant d'aller plus loin, savez-vous que la première région productrice d'huîtres en France est la Normandie ? Elle recouvre 4 grands crus aux caractéristiques bien distinctes :

- les huîtres de la Côte de Nacre, à l’extrémité est du site historique d’Arromanches, qui proviennent de Meuvaines-Asnelles ;

- celles d'Isigny sur Mer, produites dans la Baie des Veys, à Utah Beach, Isigny-sur-Mer et Grandcamp-Maisy, reconnaissables à leur chair douce et croquante ;

- celles de Saint-Vaast la Hougue (et de l'île de Tatihou), sur la côte est du Cotentin, à la fois iodées et charnues, au goût de noisette caractéristique ;

- enfin, les huîtres dites de « pleine mer », caractérisées par leur parfum iodé et leur goût corsé, élevées sur la côte ouest du Cotentin, à Agon-Coutainville, Blainville-sur-Mer, Chausey, Gouville-sur-Mer, Pirou et Saint-Germain sur Ay.

Il existe aussi des variétés d'huîtres "fines" et "spéciales", élevées dans une seule exploitation en claires, en Normandie, à Barneville-Carteret.

2013 06 06 - parcs à huîtres de Blainville (6)

A noter que, malgré leur appellation, les huîtres de la Baie du Mont-Saint-Michel (certes délicieuses) ne sont pas normandes mais bretonnes (élevées entre Cherruex et Cancale). Allez savoir pourquoi elles portent ce nom... Peut-être parce que les Bretons sont de bien meilleurs communicants que les Normands ?

2013 06 06 - parcs à huîtres de Blainville (8)

L'ostréiculture normande

Car si les huîtres de Normandie semblent avoir plus de mal à se faire connaître que les autres (exceptées celles d'Isigny), c'est peut-être parce que les conchyliculteurs normands ne sont ni vendeurs, ni promoteurs dans l'âme. Leur métier à eux, c'est l'élevage de coquillages, l'agricuture de de la mer. Leur vie, c'est le produit naturel et authentique. Peu enclin à la commercialisation, certains producteurs d'Utah Beach fournissent même des Charentais qui les vendent en tant que charentaises !

L'autre raison qui pourrait expliquer l'absence de certains crus d'huîtres de Normandie sur l'ensemble de l'Hexagone revient sans doute au fait que la conchyliculteur y est assez récente. Elle démarre à Saint-Vaast vers 1880 et connaît un essor important à partir de 1970 et l'arrivée de la technique d'élevage sur tables, toujours d'actualité. Auparavant, on y ramassait des huîtres plates sauvages. Les "perlots" y étaient même très abondantes et ce, déjà au bas Moyen-Age (on a retrouvé des bijoux en nacre de coquilles d'huîtres dans une sépulture à Coutances). La région est donc devenue la première productrice d'huitres creuses en 40 ans seulement !

2013 06 06 - parcs à huîtres de Blainville (7)

2013 06 06 - parcs à huîtres de Blainville (2)

Des parcs au coeur des courants

Il faut dire qu'avec leurs grandes plages exposées aux vents du large et leurs puissants courants des marées, les côtes normandes offrent un milieu exceptionnel pour les huîtres. Les 13 mètres de marnage en équinoxe de la côte Ouest du Cotentin leur profitent : grâce au va-et-vient permanent des flots et au renouvellement du plancton, les eaux côtières sont riches et les huîtres bien nourries. En s’ouvrant et se fermant selon l’alternance des marées, elles sont également bien oxygénées et bien musclées. Elles croissent rapidement, se bonifient en consistance et en saveurs et atteignent leur taille marchande en 3 ans (2 ans 1/2 pour les têtes de lot). Trois années qui sont loin d'être de tout repos...

2013 06 06 - parcs à huîtres de Blainville (3)

2013 06 06 - parcs à huîtres de Blainville (1) - naissins

Du naissain à l'huître, quelle histoire

La plupart des huîtres normandes proviennent de l'Atlantique, au large de la Charente-Maritime ou de Bretagne. Elles y naissent en juillet et août, captées  en mer sur des supports appelés collecteurs ou élevées dans des centres d’élevage, les écloseries. Vers 6 mois, les naissains arrivent sur la côte normande. 5000 et 15000 naissains par kg sont triés, mis en poches et remis en mer, sur des tables métalliques hautes de 40 à 50 cm, installées dans un parc d'élevage sur le littoral, à l’abri de la vase. Ils y doublent de volume la première année.

2013 06 06 - parcs à huîtres de Blainville (4) - naissins

2013 06 06 - parcs à huîtres de Blainville (9)

Installées ensuite dans le parc de pleine mer, sur l’estran (la partie de la côte recouverte chaque jour par les marées), les huîtres poursuivent leur croissance et acquièrent vigueur et caractère. C'est au printemps et à l'automne que leur pousse est la plus spectaculaire.

2013 06 06 - parcs à huîtres de Blainville (13) - les ostériculteurs profitent de la marée pour secouer et taper les poches à huitres

Durant ces 3 années, les huîtres sont manipulées environ 150 fois par les ostréiculteurs. "Pour avoir des huîtres, il ne suffit pas de les mettre dans des poches. Il faut les suivre, les travailler pour leur permettre de pousser correctement." Ainsi, à chaque marée (tous les 15 jours), les poches sont retournées, secouées, battues (pour que les huîtres ne restent pas accrochées dans les mailles), nettoyées des algues qui les emprisonnent. Un travail harassant car les poches sont très lourdes, que les parcs sont exposés au vent, aux embruns, souvent à la pluie.

2013 06 06 - parcs à huîtres de Blainville (11) - les ostériculteurs profitent de la marée pour secouer et taper les poches à huitres

2013 06 06 - parcs à huîtres de Blainville (14) - les ostériculteurs profitent de la marée pour secouer et taper les poches à huitres

2013 06 06 - parcs à huîtres de Blainville (15) - les ostériculteurs profitent de la marée pour secouer et taper les poches à huitres

2013 06 06 - parcs à huîtres de Blainville (10) - les ostériculteurs profitent de la marée pour secouer et taper les poches à huitres

2013 06 06 - parcs à huîtres de Blainville (12) - les ostériculteurs profitent de la marée pour secouer et taper les poches à huitres"L'ostréiculteur ne produit pas des huîtres, il les accompagne", aime à dire Louis Tessier.

Ces jours là, il faut faire vite car la mer remonte très rapidement. Une horde de tracteurs défilent sur la plage, les plateaux chargées de poche que les hommes rapportent à l'atelier pour les vider, trier et classer les huîtres selon leur taille et les remettre dans des poches nettoyées au maillage plus grand. Une opération nécessaire pour éviter aux coquillages de "pousser en oreilles de lapin" (l'huître prend alors une forme particulière, génée par les mailles de la poche) qui les rendraient invendables même si cette pousse n'altère en rien le goût.

2013 06 06 - plage de Blainville (1)

2013 06 06 - Atelier de Louis Tessier Blainville (2)

2013 06 06 - Atelier de Louis Tessier Blainville (3)

2013 06 06 - Atelier de Louis Tessier Blainville (4)

2013 06 06 - Atelier de Louis Tessier Blainville (5)

2013 06 06 - Atelier de Louis Tessier Blainville (6)

2013 06 06 - Atelier de Louis Tessier Blainville (7)

 

Après ces 3 années d'élevage, où les huîtres ont acquis un caractère gustatif particulier, une typicité qui varie selon le terroir, et ont atteint leur taille de commercialisation, elles sont calibrées (c'est à ce moment-là qu'on leur attribue un numéro, de 0 à 6) et mises en parc de réserve pendant un mois pour se remettre des manipulations stressantes des machines (il ne faut pas oublier que l'huître est un être vivant). Ce sont dans ces bassins d’eau de mer qu'elles se développent en épaisseur et s'affinent en  qualités organoleptiques.

2013 06 06 - Atelier de Louis Tessier Blainville (1)

Avant de les commercialiser, les huîtres de Louis Tessier sont lavées à l'eau de puits (une eau saumâtre) pour retirer la vase puis rangées à plat, valves creuses en dessous, dans des paniers scellés ou conditionnées dans des sacs pour la vente en vrac. Avant de rejoindre les étals des marchés régionaux et parisiens...

2013 06 06 - plage de Blainville (6)

Plus d'infos sur Huitres & Moules de bouchot de Normandie

Thalassa Distribution (Louis Tessier) - 8 Zone Conchylicole - 50560 Blainville-sur-Mer - www.thalassa-distribution.com

Posté par magkp à 08:50 - - Commentaires [0] - Permalien [#]
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