C'est beau Rungis la nuit...
Quand à la demande de mon mari, notre voisin restaurateur a accepté de m'amener avec lui à Rungis, je ne pensais pas que je vivrais une nuit aussi particulière. Levée à 3h30 après avoir dormi une heure seulement ( pourquoi est-ce toujours quand on doit dormir qu'on ne trouve pas le sommeil ???), j'ai donc retrouvé Laurent à 4 heures pétantes qui m'attendait au pied de son camion frigo. Une demi-heure plus tard, nous franchissions le péage qui marquait l'entrée d'un lieu privé, réservé aux seuls commerçants et gens du métier.
Si l'A86 m'avait semblé déserte pour venir, ici, au contraire, les camions et camionettes grouillaient comme dans une fourmillière. Malgré les fléchages au sol et les panneaux routiers, chacun allait là où il devait aller, seulement préoccupé par ses achats et ses chargements. Les bâtiments défilaient à perte de vue de chaque côté des axes principaux. Ici et là, des brasseries illuminées accueillaient des hommes (et de rares femmes) en blouse blanche, code vestimentaire des lieux. Au coeur de la nuit, alors que le tout-Paris (et le reste !) était encore endormi, le café coulait à flot et les gens s'affairaient comme si de rien n'était ! Une sorte de ville dans la ville.
Nous avons commencé par le pavillon des poissons dont la vente n'est autorisée que de 2 à 6 heures. Pas question de trainer donc pour dégoter de la bonne camelote. Homard bleu, thon, cuisses de grenouilles, sardines, anchois, gambas... Tout sentait le frais et le bon !
Laurent, lui, avait passé sa commande à minuit, à la fin de son service. D'ailleurs, une palette nous attendait. Il n'y avait plus qu'à charger. Premier chargement qui allait être suivi de plusieurs autres...
De nouveau dans le camion, nous nous sommes dirigés vers l'un des 5 pavillons de fruits et légumes pour passer une commande. Les cageots s'empilaient, de provenance de France, mais aussi d'Espagne, du Portugal... Je réalisais qu'ici, on ne laissait pas une énorme place aux producteurs français. Rungis est un marché international, ça ne faisait pas un doute !
Le pavillon des maraichers m'a paru beaucoup plus proche de mes convictions. A 5h, les producteurs (venus d'Ile-de-France et des départements limitrophes) arrivaient tranquillement, déchargeant leurs cageots de salades bien fraiches et délicieuses (ah l'arroche et sa couleur extraodinaire !), d'herbes aromatiques aux odeurs pénétrantes, de fleurs aux couleurs chatoyantes. Un régal pour les yeux, le palais et le nez !
Saisie par le froid du pavillon des volaillers (alors que dehors, il faisait bien lourd), je me suis extasiée devant des caisses de foie gras (que je préparerai demain, tranquillement à la maison, avec les conseils avisés de Laurent), les poulets aux plumages resplendissants... Ici, comme aux fruits et légumes, l'unité était la caisse. Une méthode d'acaht bien loin de celle que je pratique au marché. J'ai par ailleurs découvert que les cochons de lait étaient vendus par les volaillers. Tiens, comme c'est curieux !
Nous avons poursuivi par le pavillon de la triperie. Et là, malgré un petit-déjeuner solide à 3h30, je commençais à avoir la nausée. Toutes ces langues, ces foies, ces coeurs, ces ris (ah les ris de veau à la crème...), ces moues, ces têtes me remuaient la tripaille ! Etait-ce la vue ? La quantité ? A moins que ça ne soit l'odeur... Il était tant de passer à autre chose de plus soft !
Le pavillon des viandes et la visite de l'atelier de découpe, spécialement adapté aux besoins des restaurateurs, leur évitant d'acheter des carcasses entières, ont eu raison de mon "mal être".
La crémerie et l'épicerie italienne davantage encore. Les fromages étaient tous plus apétissants les uns que les autres. J'y aurais bien fait leur fête avec un morceau de pain bien frais. Cela serait pour une prochaine fois !
7 heures approchaient, le jour était levé, la chaleur malheureusement dissipée, il était temps de passer chercher la commande de fruits et légumes. Un petit tour chez le spécialiste des fruits rouges pour s'y procurer des fraises, des groseilles et des framboises, et chez l'épicier marocain pour faire le plein d'olives et de câpres (ah les noix de cajou, rien qu'à regarder les sacs, j'en avais l'eau à la bouche !), et le camion était plein. Enfin, comme un ravitaillement de début d'été (l'hiver, les piles atteignent le plafond du camion). Celui pour une semaine. De quoi assurer 1000 couverts...
Laurent m'a encore fait visiter le marché aux fleurs coupées, plutôt désert car les ventes ne sont pas assurées le mercredi, quelques pépinières et un marchand de meuble dont l'entrepôt est digne de la caverne d'Ali-Baba. Des trésors de chine... Un petit pain au chocolat et un café, c'est avec des valises pleins les yeux et des sacs pleins les mains que j'ai rejoint ma petite maison, à l'heure où d'habitude je sors de chez moi !
Encore un immense merci à toi, Cyril, pour avoir insufflé cette sortie, et à Laurent pour ce moment inoubliable !
Demain, atelier foie gras à la maison !